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Etre femme et immigrée à l'époque de la construction navale à la Seyne-sur-Mer

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Transcription : Femme d’un soudeur des chantiers dès 1969

Collecteur : Prestataire exterieur
Langue : Français

Qualité du son : bonne


Le départ d'Algérie et l'arrivée à La Seyne Écouter cette séquence

Quand je suis arrivée, j’ai habité à Berthe. J’avais un petit appartement, alors que j’avais une grande maison en Algérie. J’avais du travail et là rien. J’avais beaucoup d’amis, ici j’avais rien donc c’était vraiment très dur pour moi.
J’ai commencé à sympathiser avec mes voisines, avec les commerçants.


Le parcours professionnel du témoin Écouter cette séquence


Les activités associatives Écouter cette séquence


La femme dans la société Écouter cette séquence


Les difficultés financières Écouter cette séquence

A un moment donné, mon mari est tombé malade et c’était difficile. Je devais faire des heures de ménage à droite et à gauche. Je comptais les petites pièces et tous les matins, pour faire les courses, je prenais les grosses pièces et les petites.

Après mon divorce, j’achetais un bifteck une à deux fois par semaine à mes enfants et moi, quand j’avais de l’argent, je mangeais un œuf et quand je n’avais rien c’était le café au lait.


La profession des enfants Écouter cette séquence


L'enfance en Algérie Écouter cette séquence


Souvenirs de la guerre d’Algérie Écouter cette séquence

J’ai vécu la guerre durant 1 an ½. Mon père étant muté à Alger, ma mère et moi sommes parties en Kabylie.
Avant, je n’avais pas vu la violence de la guerre car j’habitais en ville.
En Kabylie, c’était le maquis, la montagne.

Il y avait un jeune du village que j’aimais beaucoup. Un jour, les militaires sont arrivés, ils ont rassemblé tout le monde et nous ont mis sur la place du village. D’autres sont arrivés avec une planche verte et ce jeune a eu la tête éclatée et a été exposé devant tout le monde sur la place du village. Tout le monde devait regarder. La maman de ce monsieur pleurait, s’arrachait les cheveux, elle était très mal et au moment où cette femme allait auprès de son fils, un militaire l’a jetée à terre.

Une autre fois, ma mère ne pouvait pas s’occuper de moi car elle attendait ma sœur. Je suis donc allée chez ma grand-mère.
Un jour, ils sont venus chercher mon oncle. Ils ont pris le peu d’huile, de farine, de sel, de sucre et ont tout saccagé dans la maison. Ils ont emmené mon oncle et on ne l’a plus revu.

Un jour, on est venu chercher mon père. Ça a été très traumatisant pour moi.


Le travail du témoin Écouter cette séquence

Il a fallu recommencer à zéro. Je travaillais beaucoup. La journée en mairie, le soir, je faisais du repassage, je pouvais avoir des commandes de couscous. Il y a eu des années où je n’ai dormi que 2 ou 3 heures dans la nuit.


Le besoin d’être en activité Écouter cette séquence

Aujourd’hui, je souffle un peu et c’est pourquoi je m’investis dans les associations pour combler ce manque.

A la maison, quand je n’ai rien à faire, je passe l’aspirateur, je lis mais si je n’ai plus de bouquin et plus rien à faire dans la maison, il faut que je sorte pour aller chercher quelque chose à faire. Je ne peux pas rester sans rien faire.


La culture française en Algérie Écouter cette séquence

J’étais liée à la France par la langue et la culture. On avait des voisins français. J’ai fait mes études chez les sœurs. J’étais en contact avec des françaises, donc j’ai adopté leur façon de vivre.


La fierté d’une mère Écouter cette séquence

Je suis contente car j’ai réalisé quelque chose dans ma vie et surtout j’ai réussi mes enfants.


L'aide à la famille d’Algérie Écouter cette séquence

Mon travail m’a permis d’aider toute ma famille, car après l’indépendance ce n’était plus tout à fait ça. On prenait des terres, on détruisait des magasins. En plus mon père était seul pour travailler et c’était quand même une famille de 11 enfants.

Comme j’étais l’aînée, j’étais un peu comme leur seconde maman.


L'intégration Écouter cette séquence

Je n’ai pas eu de souci pour m’intégrer, sauf avec les pieds noirs d’Algérie au départ.

Quand je suis arrivée au Pas du Loup, j’ai cuisiné des beignets et j’ai tapé à toutes les portes de mon immeuble pour me présenter.

J’ai le contact facile, je suis ouverte et quand je suis en face d’un français je parle français, d’une arabe je parle arabe.

Je vais chez des français, ils cuisinent le porc, je ne dis pas que je ne mange pas le porc, je dis que je suis végétarienne.

La religion ne doit pas rentrer dans la vie d’une personne en dehors de son cœur et de chez elle. Vous croyez, c’est bien, vous ne croyez pas, c’est votre droit.

Ma fille avait un petit ami français. J’étais contente. Mon fils est venu avec une française, c’est aussi bien.


L’accueil des seynois à son arrivée Écouter cette séquence

Je n’ai pas eu de souci avec les seynois, sauf avec les pieds noirs au départ, mais j’ai discuté avec eux.

Quand je suis arrivée et que j’ai emménagé, je n’avais rien. Elle me présente Madame Godin. Cette famille avait un magasin de meubles, d’électroménager. Elle m’avait fait ma liste des meubles qu’il me fallait en fonction du crédit possible. Mais je n’avais pas la vaisselle. Elle m’avait dit : ‘c’est toi qui vas me le payer. Ce n’est pas sur le dos de la CAF. Tu économises et quand tu as des sous, tu me rembourses petit à petit’. C’était entre elle et moi et il n’y avait rien de signé. C’était des petits comptes d’épicier et pourtant elle ne m’avait jamais vue avant.

J’ai rencontré des médecins qui sont devenus des amis. J’allais à la pharmacie, on me connaissait. Mon intégration s’est très bien passée...

... Sauf avec les femmes algériennes.

Quand j’ai divorcé, ce sont les françaises qui m’ont hébergée, mais aucun arabe me l’a proposé.


La rencontre avec le mari, les chantiers en 1972 Écouter cette séquence


L’importance économique, sociale et psychologique des chantiers Écouter cette séquence

On était la population de La Seyne et les chantiers était imbriqués, indissociables de la ville. On vivait par les chantiers, des chantiers, pour les chantiers, avec les chantiers et les chantiers, grâce aux chantiers. C’était tout le Var. Il y avait plein de commerçants, plein de gens qui vivaient des chantiers, même s’ils n’y travaillaient pas.

Le jour où ça s’est effondré, même si je travaillais en mairie, j’avais l’impression d’être amputée de la moitié de mon corps, parce que mon mari travaillait là, j’amenais les enfants chercher le jouet aux chantiers, je les amenais à la puéricultrice des chantiers. Ils partaient en vacance au ski avec les chantiers. On avait un souci d’argent, on allait voir l’assistante sociale pour une avance sur le mois. On allait voir le lancement des bateaux, on était content. Quand il y avait une grosse commande, c’était dans le journal et on était content.

Le jour où cela s’est arrêté, ça s’est arrêté pour tout le monde, financièrement mais beaucoup psychologiquement.

Le parc est aujourd’hui joli, mais quand je me gare au parking, je sais qu’à cet endroit il y avait la mutuelle des chantiers et ça me fait encore mal.

J’ai tourné la page car il le faut. Il y a eu une vie pendant les chantiers, il y a une vie après les chantiers. Mais ça reste difficile.
J’ai commencé grâce à sa vie. Je suis venue là car mon mari travaillait aux chantiers. On a eu l’appartement de la Présentation par les chantiers. Je ne peux pas du jour au lendemain l’amputer de ma mémoire, me l’enlever du cerveau.
Je vais mourir avec.

C’est comme George Sand qui dit qu’on est de la nature, par la nature, pour la nature, dans la nature.
Nous, ce sont les chantiers à la place de la nature.


Les commerçants de La Seyne pendant et après les chantiers Écouter cette séquence

On allait chercher le pain, on n’avait pas de monnaie, on prenait le pain et le lendemain on payait deux baguettes au lieu d’une.

J’allais à la pharmacie des chantiers. Je n’avais pas d’argent, mais je prenais quelque chose qui n’était pas remboursé et je repassais que le lendemain ou la semaine d’après. Ils me le donnaient et ils ne le notaient pas.

C’était beaucoup plus convivial. on dit qu’on enjolive mais on n’enjolive pas. On ne se rendait pas compte de la chance qu’on avait et comme c’était bien.

Quand vous vous promeniez dans les rues de La Seyne pour acheter un truc, il n’y avait plus qu’Auchan pour faire les courses.


Les avantages sociaux et économiques des chantiers Écouter cette séquence

Quand on était aux chantiers, on était content. On avait beaucoup de facilité par rapport aux autres professions. Les chantiers avaient tout prévu. On avait une mutuelle, une pharmacie, des magasins, une permanence pour les enfants, des vacances, une retraite complémentaire, la ‘caisse interentreprises’. Ils étaient en avance sur le temps.

Les chantiers, c’est que du positif, sauf sa fermeture.

Quand il y avait des événements, on allait voir les assistantes sociales pour qu’elles nous fassent une avance sur salaire.

Il y avait la possibilité d’effectuer des heures supplémentaires aux chantiers.

On s’en sortait beaucoup mieux que maintenant.


Femme d'un travailleur des chantiers Écouter cette séquence


L'amour de la ville de La Seyne et la fermeture des chantiers Écouter cette séquence

[...] et c’est la ville où je voudrais mourir. Ville où je me suis construite et affirmée. Ville généreuse et solidaire, authentique, avec un fond bon et généreux.

Aujourd’hui, quand je passe près des chantiers et que je vois ce parc magnifique, j’ai encore cette cicatrice. Je me revois avec les enfants, les amener au médecin, au pédiatre des chantiers.


Un mari, soudeur aux chantiers Écouter cette séquence

Mon mari travaillait comme soudeur [...]


L’association AMIANS Écouter cette séquence

On en a entendu parler une fois les chantiers fermés.


Les soudeurs après la fermeture des chantiers Écouter cette séquence

Nombreux ont déménagé hors du département. Un est mort dans un accident aux chantiers et un camarade s’est suicidé.


Des ouvriers heureux de travailler Écouter cette séquence


La fermeture des chantiers, un choc Écouter cette séquence

Quand ça a fermé, ça m’a fait un coup. C’est une partie de mes souvenirs, c’est une partie de la ville. C’était triste pendant quelques années.


Les conséquences de la fermeture des chantiers  Écouter cette séquence

Il y avait des commerces jusqu’à la rue Esprit Armando, du monde le jour comme la nuit.
Je travaillais à 4H30 du matin. Je n’avais pas peur de me rendre au travail, il y avait du monde tout le temps, les bars, les magasins, la boulangerie devant les chantiers étaient ouverts tout le temps.

On avait l’habitude d’aller dans un magasin, il avait fermé, on avait l’habitude de rencontrer une dame tous les jours, on la voyait plus car elle avait déménagé. Ça avait tout chamboulé.
On se connaissait tous et ça fermait au fur et à mesure.
C’était inquiétant, car on avait l’impression de se retrouver seul.


Les bruits des chantiers Écouter cette séquence

Comme j’habitais à la Présentation, j’étais en plein dedans. J’entendais la sirène et le pas des ouvriers tous les jours.
Quand je descendais les matins, j’étais avec les ouvriers.

Jour et nuit, j’entendais le marteau. Je m’y étais fait. J’ai commencé à avoir des insomnies quand ce bruit a cessé, parce que ce bruit m’apportait une sécurité. C’est ce silence qui me dérangeait.


La Seyne, une ville sécurisante et vivante à l'époque des chantiers Écouter cette séquence

Il y avait toujours quelqu’un. Je partais à 4H30 et je n’avais pas peur de me faire agresser. Maintenant je ne pourrais plus. Je passais le boulevard du marché, je n’avais pas peur parce qu’il y avait toujours quelqu’un.
C’était très vivant.


L'espoir jusqu'à la fin des chantiers Écouter cette séquence

On avait toujours espoir. Si on partait, on participait à l’assassinat des chantiers.

C’est comme si vous aviez un membre de votre famille dans le coma, tant qu’il respire, même s’il n’ouvre plus les yeux, qu’il n’entend plus, qu’il ne parle plus, son cœur bat. Allez débrancher l’appareil qui le tient en vie.
Pour nous, les chantiers c’était ça.


La fierté des chantiers Écouter cette séquence

Quand vous passez tous les matins devant, vous êtes contente car il y a de la vie. C’est bruyant, c’est vivant. Ça nourrit toute une ville. Ça ne fait pas cimetière. Vous arrivez devant des bureaux, ils sont tous devant leur ordinateur. Vous n’entendez rien, il n’y a rien qui sort, hormis des feuilles de papier. Tandis qu’aux chantiers, vous allez voir des camions de barres de fer rentrés et un jour on va vous dire qu’il y a un bateau qui va partir et on va aller au lancement d’un bateau qui va rendre heureux les gens.

Il y a les chantiers et ce qu’ils vont apporter pour nous et pour les autres.

D’une barre de fer ces hommes ont pu faire des bateaux magnifiques.


Les avantages sociaux aux chantiers Écouter cette séquence

Quand je n’avais pas d’argent et que j’allais voir une assistante sociale des chantiers, elle me disait jamais non pour avoir une petite avance sur le mois prochain.

Quand j’avais envie d’acheter une robe à ma fille ou pour partir en voyage, on m’avançait et c’était du 0 %.

On était heureux. J’étais consciente de mon bonheur car je côtoyais d’autres personnes qui ne travaillaient pas aux chantiers et qui n’avaient pas la chance que l’on avait.
On avait notre pharmacie. Je tendais l’ordonnance, on me donnait des médicaments, je n’avais pas l’argent, je payais le lendemain.
Je venais de payer le médecin, on me remboursait immédiatement.
J’arrivais quelque part et je disais que j’avais la mutuelle des chantiers toutes les portes s’ouvraient, que ce soit chez le médecin, à la pharmacie, à l’hôpital, à la clinique.


Faire carrière aux chantiers, une évidence Écouter cette séquence

On ne pensait pas à aller travailler ailleurs. C’est inconcevable.

Si j’avais eu la possibilité de le faire, je l’aurais fait.


Les conditions de travail des femmes aux chantiers Écouter cette séquence

Une année, mon mari était hospitalisé, il venait d’avoir eu un accident aux chantiers, c’était avant Noël et en allant voir mon mari je me suis fait renverser avec la petite.
On venait d’emménager, je n’avais pas de sapin, j’étais perdue.
Ces femmes sont arrivées avec le sapin, de quoi décorer le sapin, des cadeaux pour la petite, elles m’ont aidée à faire mes papiers.

C’était une entreprise qui était en avance sur son temps, parce que ce que l’on trouvait à l’époque aux chantiers, on ne le retrouvait pas dans d’autres entreprises comme la retraite, la CRI qui complétait le salaire en cas de maladie.

Elles pouvaient avoir des aménagements d’horaires.

Je n’ai pas rencontré de filles qui me disaient qu’elles n’étaient pas bien aux chantiers et qu’elles souhaitaient partir, ou qu’elles cherchaient un autre travail ailleurs.
Au contraire, dès qu’elles avaient une fille, une sœur, elles essayaient de les faire rentrer.

C’était, à toutes, notre objectif de travailler et faire rentrer de la famille si on avait trouvé.


L'amour de La Seyne et des chantiers Écouter cette séquence

Pour ma génération, c’est difficile de panser les plaies. On va radoter longtemps.

Je suis une passionnée des chantiers de La Seyne. Je suis une passionnée de La Seyne et je n’ai qu’un souhait, c’est que l’on m’enterre à La Seyne.


Le syndicalisme et la solidarité aux chantiers  Écouter cette séquence

Quand mon ex-mari a eu son accident, ils sont venus m’avertir. Ils m’ont téléphoné pour voir si je n’avais besoin de rien. C’était un peu comme la famille. A l’époque, quand on voyait que les gens étaient malades souvent, il y avait l’assistante sociale qui se déplaçait. Les gens se souciaient et demandaient si on avait besoin de quelque chose.
Une fois, je n’avais pas encore le téléphone, mon mari avait eu un accident. C’est un gars de la CGT qui est venu pour m’en informer. Il m’a rassurée. Il m’a amenée à l’hôpital. A attendu pour que je voie mon mari et m’a ramenée chez moi. Je n’avais jamais vu cet homme auparavant.
C’était humain.

On partait en vacances ensemble entre voisins, amis. On rigolait, on faisait les sorties.
Quand quelqu’un n’était pas bien, on le savait. On l’aidait et on pouvait même aller voir l’assistante sociale.

C’était une autre façon de fonctionner.

On avait des amis soudeurs, informaticiens, ingénieurs. On se mélangeait. On ne regardait pas la différence sociale.

Ils étaient très présents. Ils bougeaient beaucoup plus à cette époque. Dès qu’il y avait une revendication, ils bougeaient et, la plupart du temps, ils avaient comme par exemple les primes d’intéressement au bénéfice. Ils ont obtenu beaucoup de choses que ce soit dans le social, pour les enfants.

Quand mon mari a été malade, ils ont été là. Ils n’ont expliqué la marche à suivre et, en cas de problème, nous disaient de les rappeler. A chaque fois qu’on les appelait, ils ne se défilaient pas. Pareil pour les assistantes sociales et même les gens du bureau.


Faire crédit à l'époque des chantiers Écouter cette séquence

Je n’avais pas de souci, car je savais que le problème pourrait être réglé. Tout ça, c’était grâce aux chantiers.

Une fois, ma machine était tombée en panne. Je suis allée voir madame Godin. Mais je n’avais pas d’argent. Elle m’avait répondu que ce n’était pas un problème. Ils sont venus, ils m’ont installé ma machine à laver. Pourtant, je n’avais encore rien signé. Elle avait fait une fiche et je lui remboursais petit à petit.

Je n’avais jamais le porte-monnaie sur moi pour travailler. Quand je rentrais chez moi, je m’arrêtais chez le boulanger, au marchand de légumes et je payais une autre fois.

C’était un peu comme une grande famille.

Il y avait une mentalité du côté des habitants, des commerces et des chantiers qui était quand même basée sur la confiance.

On était comme dans un village.


La solidarité de voisinage et aux chantiers Écouter cette séquence

Avant avec les voisins, on repeignait tous les halls. On achetait la peinture. Certains peignaient. Moi, je nettoyais ou je préparais des gâteaux pour tout le monde.

On se gardait mutuellement les enfants. On allait avec deux enfants à l’école et on en ramenait 5 ou 6.

Il y avait un échange.

Quand ils cassaient la croûte, ils se partageaient leur repas. Je lui faisais beaucoup pour son casse-croûte pour qu’ils mangent tous.


La Seyne après la fermeture des chantiers Écouter cette séquence

Certains sont partis. D’autres sont arrivés, en apportant leur mode de vie. Ça a bousculé plein de choses.


L'apprentissage au centre de formation des chantiers Écouter cette séquence

Mon mari a été formé par les chantiers. Il avait 17 ans quand il est rentré aux chantiers en apprentissage.


Les ouvriers après la fermeture Écouter cette séquence

Après la fermeture, beaucoup sont partis pour travailler partout en France. C’était des gens qualifiés. Ce n’était pas rien de construire ces bateaux.

Beaucoup ont retrouvé à l’Arsenal, à la CNIM. D’autres sont partis en préretraite ou en retraite. Beaucoup ont sombré dans la dépression car ils n’ont rien retrouvé. La situation n’était pas facile, surtout quand le couple travaillait aux chantiers.


Parler des chantiers, un besoin Écouter cette séquence

Ça me fait comme une soupape qui se soulève un peu.
Volonté de laisser un message de solidarité, de fraternité aux futures générations.
Maintenant, il n’y a plus ce qu’il y avait avant.

Quand j’ai l’occasion de parler des chantiers, je ne la loupe pas.
Quand je trouve des gens qui ont vécu les chantiers, on parle et c’est vrai que ça nous fait plaisir.

Dès que je retrouve un papier ancien des chantiers, pour moi il a de la valeur et je n’arrive pas à m’en séparer.


De bons souvenirs Écouter cette séquence

Indirectement, tous les gens, même les moins concernés, étaient touchés par les chantiers.

Pour cette atmosphère là, il fallait 3 ingrédients : La Seyne, les chantiers et les ouvriers.
La Seyne, c’était une grande ville. Les seynois une grande famille. Et les chantiers, la cuisine, la salle à manger, une grande maison.

On était heureux et ce sont de bons souvenirs.


La Seyne aujourd'hui Écouter cette séquence

Je m’adapte à la nouvelle « scène » et j’essaye de jouer un nouveau rôle, peut-être moins bien que le premier.


Les ouvriers en sous-traitance Écouter cette séquence

Mon mari étant des chantiers, je ne les connais pas. J’en ai entendu parler.
Ça ne devait pas être agréable pour eux.
Ils étaient pas plus malheureux qu’ailleurs, même s’ils étaient sous-payés.

On avait un ami qui travaillait dans une sous-traitance. Il ne s’est jamais plaint.

Je ne pense pas que les chantiers, a fortiori les syndicats, aient accepté de l’esclavage sous leur toit.